FOLIE
Folie est un bien grand mot. On me dit souvent que je suis folle. Le suis-je réellement ? Je ne crois pas.
J’aime parler aux arbres. J’aime écouter le bourdonnement de l’atmosphère matinale. J’aime imiter le chant des oiseaux. J’aime penser à ce qu’on doit ressentir après la mort. J’aime regarder dans le vide pendant des heures. J’aime me dire qu’un jour tout sera beau. J’aime croire en la magie. J’aime beaucoup de choses, en fait. Mais toutes ces choses sont-elles bien sensées ? M’aideront-elles un jour à être riche, à avoir une belle maison, de beaux vêtements, pleins de copains chez lesquels j’irai faire des garden-parties et me baigner dans la piscine ? Je ne crois pas. Mais je m’en moque. Pourtant, on me dit souvent : « Ce n’est pas en rêvant que tu trouveras du boulot », ou encore « Ne sois pas bête, la magie n’existe pas ! » Vraiment ? Alors comment allons-nous faire pour nous en sortir ? On me dit que je suis folle, mais ils sont tous plus fous que moi, et ils ne s’en rendent même pas compte. La preuve : ils n’entendent pas les arbres, ne voient pas le vide, n’aiment que leur propre vie. Il faut être fou pour n’aimer que soi. Il faut être fou pour ne pas se sentir coupable après avoir provoqué la mort, même celle d’une fourmi. Il faut être fou pour ne pas être fou.
Si un jour on vous dit que vous êtes fou, souvenez-vous bien de cela : les fous croient que ce sont les autres qui sont fous. Les fous ne voient que la réalité matérielle des choses. Les fous ne pensent à la mort qu’en tant que fin de vie et n’ont peur que de leur propre mort. Les fous sont ceux qui rient de la folie. Et surtout, les fous sont ceux qui ne comprendront pas un traître mot de ce que je viens de raconter.